Un été à Charleroi
Charleroi, septembre 2008
"Je n’aime pas Charleroi. Je n’ai jamais aimé cette ville. Je ne suis pas né ici. Mes parents ont déménagé et m’ont amené ici, dans une commune toute proche, pas loin de la gare.
Il y a longtemps. Ils sont restés, moi aussi.
J’ai grandi dans ses écoles, dans ce triste décor, dans son insoutenable odeur, dans ses couleurs, ses usines, son état d’esprit.
J’ai grandi dedans et je n’ai jamais pu aimer cette ville.






Je l’ai contourné des centaines de fois, toujours dans le même sens, la tête ailleurs, une trajectoire rapide, sorte de travelling sur ce que la ville nous montre : sa gare, ses trop nombreux cafés, ses tunnels, son stade de football, une ligne de métro, un fleuve et de l’autre côté le triste souvenir d’une époque industrielle oubliée.


Je l’ai prise en photo. Je l’ai même filmée.
Je l’ai critiquée, toujours. Souvent, j’ai eu envie de l’oublier en m’évadant vers d’autres villes, plus belles ? Et toujours, je l’ai trouvée laide et inintéressante. Puante.
Pourtant je suis toujours ici, entre ses murs. Je veux la comprendre, la voir autrement, chercher sa beauté, comprendre aussi l’amour que lui ses habitants.
Cela fait quinze ans que je travaille sur Charleroi. Je traîne ce travail ne sachant pas où je dois l’amener. Je n’ai jamais eu de projets précis. Je voulais faire quelque chose, comme un cri visuel, un cri de détresse : « Ne voyez-vous pas votre ville ? »
Je suis mal dans cette ville. Très mal. La ville ne présente aucun plaisir. J’ai marché des heures. Et pendant des heures, j’ai vu les mêmes choses ".